mardi 11 octobre 2011

Bits of Leb (linguistique, liste évolutive et potentiellement sujette à controverse)

Je prends des cours de Libanais. Mon prof est génial et très généreux de ses réflexions, c'est une chance et je suis reconnaissante de ses enseignements. Certaines particularités m'ont fascinée.

On utilise le verbe être différemment. En Français on nous apprend à l'école, sujet+verbe+attribut du sujet, une phrase sans verbe n'est pas une phrase. En libanais c'est différent, le verbe être n'est pas utilisé comme cela, à la légère. L'essence se suffit à elle-même, si elle est, on la sent mais on ne la qualifie pas par des mots (a fortiori par un verbe), et si elle n'est pas, ce n'est pas un verbe qui va l'amener... Effectivement en nommant l'essence, on l'enferme par des mots, relatifs, dans un moment, qui passe et qui change... Or l'essence n'est-elle pas par définition, sans se contredire pour autant, et c'est là son privilège A LA FOIS impérissable, éternelle (hors temps) et transcendante ET complètement périssable et sujette à évolution ? quels mots traduisent cette particularité sans la trahir? seule l'intuition... alors c'est bien, n'en parlons pas, et laissons l'essence sous entendue :)
(Ou alors on peut renverser l'amusement : le verbe "être", son existence même, est une contradiction et un paradoxe entre contenant et contenu...).

Ça c'est encore plus magnifique, c'est énormissime : pas de futur simple. Demain n'est pas encore, on ne sait pas s'il va être, c'est comme les embouteillages de Beyrouth. On peut parler avec justesse de son intention, mais pas de ce qui sera ou ne sera pas, or il s'agit de parler justement sinon une parole n'a plus de valeur. On ne dit pas "je mangerai" mais "je veux manger". Les tapis magiques se gouvernent à l'intention et ne reçoivent pas sur rendez-vous :) mais ça on le sait depuis qu'on est tout petit :)

Ça aussi ça m'enchante, j'en souris rien que d'y penser, parce que c'est très fin : on compte à partir de trois. En Français le pluriel commence à partir de deux. En libanais c'est singulier, duel, pluriel. Autrement dit, on commence à compter, à remarquer, à partir de trois. Un est tout seul, deux est particulier, et puis après c'est pluriel. Je trouve très joli que deux soit particulier aussi. Et puis dans le pluriel, il y a le pluriel des objets et le pluriel poétique ou  générique. Je trouve très joli de distinguer le pluriel des objets matériels et le pluriel de l'idée impérissable et intouchable, donner une existence conceptuelle. :) l'existence de l'essence est sous entendue implicitement par le choix du mot plus que par le verbe être :)

Pour l'instant cela fait trois points notables. Cela justifierait un pluriel :) mais j'ai encore beaucoup, tellement, à apprendre. ouf tant mieux!! je contente...

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